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Papy Tobin fait peur à Jospin

L'Europe oui, la mondialisation, faut bien, mais la taxe Tobin... Faut voir... Et encore... prudence hein...! Notre Premier ministre était en ballade pour parler aux jeunes socialistes européens réunis en congrès ce week-end. Vu ce qui se passait à Millau, ils se sont fendus d'une question à l'ancien candidat à la présidentielle dont le programme faisait mention de ladite taxe Tobin.

Intrépides donc, les jeunes socialistes européens ont demandé à Lionel Jospin s'il n'avait pas un tout petit peu oublié ses promesses...

Ce qui tombait bien puisque la France prenait samedi la présidence de l'Union Européenne.

On se demande toujours pourquoi les hommes politiques passent leur temps à critiquer ceux qui sont en place (généralement dans le mouvement adverse) mais ne font pas ce qu'ils reprochent quand ils ont la chance d'être au pouvoir. Ben c'est sans doute parce que personne ne prend la peine de leur rappeler leurs promesses ou leurs programmes... Et comme ce sont des hommes très occupés, ils oublient... Prenez un exemple simple, tous les hommes politiques, quel que soit leur bord, s'accordent pour se dégommer les uns les autres à propos du chômage. Et patati et patata, machin n'a pas réussi à infléchir la courbe du chômage alors qu'il est aux affaires depuis deux ans, etc. Sauf que lorsque le critique était aux affaires, il ne faisait pas mieux. Mais ce n'est pas de sa faute, c'est parce qu'il avait oublié. Trop occupé avec la grande réforme de je-ne-sais-quoi.

Ouiiiiiiii, me direz-vous, mais justement là, Kitetoa, vous ne lisez plus les journaux parce que... ben justement, le chômage baisse à mort dans ce pays.

Bon, deux seconde et un paragraphe pour une petite digression et après on retourne à Papy Tobin. Ben oui, parce que c'est ça quand même le thème de l'article. C'est fou hein comme on peut se perdre... Si on devait présenter ce papier dans un journal, ils n'en voudraient pas. Je ne sais pas pourquoi. Bon. Revenons à notre digression...: le chômage baisse. Et vous pensez que c'est parce que Martine Aubry ou l'allumé du Medef ont fait quelque chose? Sans rire? Personne ne vous a parlé de mondialisation? Elle joue sur tous les plans la mondialisation.... Lorsque l'économie américaine marche à fond, lorsque la "reprise" est en route dans tous les pays du coin... Cela aide à faire repartir l'économie franchouillarde. Il y a quand même belle lurette que les marchés financiers ont pris le pas sur les politiques économiques des Etats. Ils engendrent les mouvements économiques des pays. Adieu macro-économie, adieu fondamentaux sur lesquels les ministres de l'Economie et des Finances pouvaient jouer. Markets rule the world!

Et justement, ces marchés [vous allez voir comment on retombe sur ses pieds après une grosse digression... C'est de l'art...] partent souvent en couilles. Cela s'appelle des bulles spéculatives. Pendant que de gros malins, avec un cigare dans le bec, spéculent (se remplissent les poches), d'autres tendent la main dans la rue en espérant empocher 10 balles pour boire du gros rouge qui tache mais permet -accessoirement-  d'oublier un peu la misère d'une vie ruinée. Et la spéculation y est pour beaucoup dans la ruine de ces vies... Alors pour tenter d'éviter les bulles spéculatives, notamment sur les marchés de devises (1500 milliards de dollars y changent de mains chaque jour) et sur les marchés de produits dérivés, un prix Nobel d'Economie (non, non, pas un affreux gauchiste illuminé...), James Tobin, a eu l'idée en 1972 de mettre en place une taxe infime sur les transactions liées aux devises. Les recettes générées permettraient de réduire sensiblement la faim et les problèmes de santé dans le monde. Alors pourquoi donc nos amis les hommes politiques ne la mettent-ils pas en place cette taxe? Mystère...

Samedi, Lionel Jospin a répondu en substance ceci aux jeunes socialistes européens: je crois avoir été un des premiers hommes politiques à parler de la taxe Tobin dans mon programme lorsque j'étais candidat à la présidence. Il faudrait en effet que nous réfléchissions à la manière dont cette taxe pourrait, ou pas, être appliquée. Il faudrait voir comment nous pourrions amener cette idée à être débattue dans les instances internationales...

Ah... Nous y voilà.

Tous les hommes politiques disent, lorsque on leur parle de la taxe Tobin, qu'il est impossible de mettre en place un "impôt" de ce type s'il ne s'agit pas d'une décision appliquée par tous les Etats. Et leur logique semble implacable: si la France mettait en place la taxe, les "investisseurs" iraient placer leurs fonds sur d'autres marchés. En Allemagne, en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis... Markets never sleep...

Ceci est l'hypocrisie la plus répugnante qu'il soit. Car si ces politiques étaient honêtes (avec eux-même) ils sauraient qu'il n'existe en ce bas monde **que** disparité. De fait, chaque Etat, aujourd'hui, et encore demain pour un bout de temps, établit ses propres règles en matière fiscale (plus largement en matière budgétaire). Pensez-vous que tous les Français se font domicilier en Suisse ou à Monaco parce que les impôts y sont plus faibles? Non bien sûr. De même, la mise en place d'un tel impôt ne ferait pas fuir les investisseurs d'une place comme celle de Paris. Si ce n'était qu'une histoire de coûts de transactions, ils seraient déjà ailleurs depuis longtemps.

Lionel Jospin ne prend  aucun risque à dire qu'il est d'accord avec l'idée de discuter de l'opportunité ou pas de mettre en place la taxe Tobin. Il sait pertinemment quels seront les argument qui serviront à justifier une décision négative. Dans vingt ans, le temps d'étudier cette idée bizarre. Et dans vingt ans, de toutes façons, Lionel sera à la retraite...

De plus, notre Premier ministre a bien pris soin de préciser dans sa réponse aux jeunes socialistes européens qu'il fallait discuter de cette question au sein des instances internationales.

Rien sans les autres! Comme ça, pas de danger que cela arrive. Et les investisseurs pourront continuer de créer de la misère.

Pour qu'un pays prenne la décision d'instaurer seul la taxe Tobin, il faudrait simplement que... ses dirigeants aient des couilles.

Kitetoa

 

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